« Non Carly, tu l’as encore raté ! Mais pourquoi faut-il que tu sois aussi brouillonne ? Pourquoi Dieu ne m’a t-il pas donné une fille gracieuse. Tu ressembles à une chiffe molle, à une énorme larve qui ne peut pas avancer. Concentre-toi un peu ! Tu perdras à coup sûr les Nationales comme ça, crois-moi. » criait Anabelle Ainsworth, ma chère et tendre mère. Chère et tendre était bien sûr un euphémisme. Ma mère était la représentation même de l’égoïsme dans ce monde. De l’égoïsme, de la méchanceté et de l’immaturité. Elle avait toujours été passionnée de patinage artistique. Lorsqu’elle avait eu dix huit ans, elle avait même était sélectionnée aux Nationales et avait échoué au dernier moment. Maintenant, elle rabattait toutes ses chances moi, sa fille, elle espérait secrètement que je réussisse là où elle avait échoué, elle vivait son rêve à travers le mien et elle avait beau vouloir faire bien, elle s’y prenait très mal. Elle passait son temps me rabaisser, à m’insulter, à se moquer de moi ou à s’énerver contre moi. A force de prendre ce rêve pour le sien, elle en oubliait souvent mes désirs et ce que je voulais faire de ma vie. Et ce que je veux faire de ma vie, c’était arrêter le patin et définitivement. Depuis que j’étais petite, elle me fait manquer des cours pour que je réalise ce stupide désir, et aujourd’hui c’en était trop. Je veux mettre fin à cette masquarade Ce que je veux ? Aller à l’université et non pas remporter ces nationales. En fait, ces nationales était la dernière de mes préoccupations. Sortir avec mes amis, profiter de ma jeunesse, aller à l’université pour obtenir mon diplôme, c’était ce que je voulais. Ainsi, alors que les nationales approchaient à grand pas, j’essayais clairement de lui faire comprendre mais elle faisait la sourde oreille. Elle répétait souvent : « Tu te décourages Carly, mais tu sais que c’est ton rêve le plus cher. Tu y travailles depuis tellement longtemps. » Non, maman c’est TON rêve pas le mien.

Je franchis la barrière qui me séparait de mon arène, de mon monde. Maintenant, je me retrouvais seule et tout ce que je pouvais voir était des ombres noirs et peut-être des flashs également. Je respirai un grand coup, ma tête me tournait. Mes sens étaient aux aguets. Ma mère m’avait dit de faire le vide et de débarrasser ma tête de toute pensée parasite. Seulement, depuis quand étais-je en mesure d’écouter ma mère ? Ce qui me venait à l'esprit était le froid, pensée aussi parasite soit-elle, mais également l'appréhension et même le dégoût. Je gardais au fond de sa bouche, ce goût de fer rouillé qui ne disparaissait jamais vraiment lorsque je me retrouvais ainsi exposée. Comme à mon habitude, je n’avais qu’une seule envie d’ailleurs : celle de fuir. Pourtant, il était trop tard, déjà les hauts parleurs commençaient leurs présentations : "Carly-Jane Ainsworth, 22 ans, Columbia". La musique retentit et mes muscles se détendirent. C'était maintenant que le défi commençait vraiment. Je m’élançai sur la glace alors que petit à petit la lumière suivait dans mon trajet. Elle tournait, elle dansait, elle évoluait avec une grâce incomparable sur ce sol givré, sous les regards attentifs, admiratifs mais aussi avides du moindre faux pas. Je n’avais pas besoin d’observer les rangées, pour espérer y trouver de la famille. Ma mère était avec les coachs, elle observait mes moindres fais et gestes. Elle le voulait tellement ce trophée ? J’en étais capable, c’était sûr mais la question était est-ce que moi j’en avais envie ? Et mon père où était-il ? J’exécutais mes mouvements et essayais de le retrouver parmi la foule. Je sautai de visage en visage, dans l’espoir de tomber sur ses yeux. De le voir sourire, immensément fier. Je me penchai pour essayer de l’imaginer et puis l’espace d’une seconde c’était fini. Je venais de tomber. Le sol s’était dérobé sous mes pieds et tout ce que je pouvais sentir à présent était la douleur. J’avais mal à la jambe certes, mais j’avais mal au cœur aussi. Ma mère venait de quitter la salle furieuse, et mon père était aux abonnés absent.

Je dormais paisiblement lorsque je sentis quelque chose s’activer autour de moi. Pensant au départ qu’il s’agissait de l’infirmière, je n’y prêtais pas attention et gardai les yeux fermés, bien que tout de même attentive aux bruits alentours. Et là, je remarquai que ce n’était pas l’infirmière, non c’était Andie ma meilleure amie d’enfance qui vivait sur New York. Je l’avais reconnu dès qu’elle s’était approchée du lit. Sa démarche était reconnaissable entre toute. Je jouai la morte alors qu’elle commençait à prendre ma main : « Oh mon dieu, Carly, je suis désolée d’avoir piqué ton mec en troisième, réveille-toi. » , je me réveillai dans un sursaut : « On était ensemble en troisième ? » alors qu’elle explosait de rire : « MERDE, TON CUL N'A PAS PASSE LES PORTES DE L'ENFER » . C’était elle tout craché, je souriais, ravie de la revoir. « T’es une belle salope Sawyer ! Tu m’as manqué. Comment t’a su que j’étais là ? » demandais-je en m’asseyant alors qu’elle redressait mon oreiller. « Ta mère bien sûr, elle était ravie de me raconter la manière dont tu t’es gamélée devant une bonne centaine de personnes. Non vraiment, elle semblait ravie ! ». Elle me poussa et se fit une place sur mon lit d’hopital. « T’es contente avoue ? » demanda-t-elle en se rapprochant. « J’avoue que cette chute tombe à pic. Tu sais que je ne peux plus faire de sport avant huit mois ? Tu imagines ? Je me sens libérée d’un poids énorme Andie. » avouai-je sincèrement. « bon allez à toi, raconte un peu. Qu’est-ce qu’il y a de nouveau ? » demandais-je en évitant le sujet de l’accident à présent. « Je te dirais ça plus tard chérie. » dit-elle en regardant la porte. Je tournai la tête et aperçus Ezra. « Je vais te chercher un petit quelque chose. Cappucino comme d’hab’ ? » demanda Andie en saluant le jeune homme et en quittant la chambre aussi vite que son ombre. « Ez ! » chuchotais-je en un souffle alors qu’il se posait en face de mon lit. « Chu. Alors de toutes les choses possibles pour attirer mon attention, la seule qui t’es venue est de te casser la figure sur la glace ? » demanda-t-il en s’asseyant sur une chaise et en la rapprochant pour se retrouver juste à mes côtés. « T’aimerais hein ? » demandais-je en haussant les sourcils avec dédain. Ezra c’était l’homme de ma vie, enfin c’était tout comme. C’était mon ami depuis l’école primaire, non c’était mon meilleur ami. Le garçon le plus gentil de tout l’univers. Comment pouvait-il être ami avec une fille comme moi hein ? C’est ce que beaucoup de personnes se posaient. Pourtant, il était et avait toujours été là pour moi. Et ce que je préférais par dessus tout était passer du temps en sa compagnie et surtout à le taquiner. On était comme chiens et chats, toujours à vouloir se chercher des poux et à voir qui craquerait le premier. « J’aurais adoré. » déclara-t-il en souriant comme il avait l’habitude de le faire pour que je baisse toutes mes défenses. « T’imagines bien que pour que je ne recommence plus, il ne va plus falloir me lâcher d’un pouce. (a) » tentai-je en redressant mon oreiller une fois de plus. « J’y compte bien. » répondit-il finalement alors que ses yeux dérivaient sur toutes les fleurs, les cadeaux que j’avais reçus. Le plus gros bouquet était celui du juri avec leurs plus gros encouragements. Tu parles ! « J’ai hâte alors » finis-je en souriant avec malice. « Mais, Chuck va te laisser venir me voir ? » demandais-je naïvement. Enfin naïvement n’était pas vraiment le mot exact. Chuck était la petite-amie d’Ezra. Ils sortaient ensemble depuis un bon bout de temps maintenant et elle n’avait toujours pas pris la fuite. Non pas qu’Ezra soit désagréable au contraire mais ses anciennes copines avaient tendance à renoncer en s’apercevant que je n’étais pas prête à rompre le contact avec lui et lui non plus. « Laisse Chuck tranquille, tu veux bien ? » demanda-t-il en souriant. AH ! il me connaissait par cœur, c’en était presque irritant. « Mais oui, bien sûr » déclarais-je en éclatant de rire. « Tu me connais voyons. » continuais-je en arquant les sourcils. « Oui, justement » finit-il par dire. « si tu le dis. » dis-je finalement en me retournant subitement dans le lit pour me retrouver dos à lui. « oh allez, arrête ta comédie et laisse-moi une petite place. » céda-t-il en s’installant à mes côtés sur le brancard qui allait sûrement céder sous le poids. Il passa ses deux bras autour de ma taille et je penchais ma tête en arrière avec satisfaction. Il me connaissait trop bien, moi et mes petits jeux.

« il ne m’a pas regardé une seule fois Andie’ c’est horrible. » continuais-je de me plaindre à mon ami alors qu’on dansait sur la plage. « il ne m’appelle plus, il ne me parle plus et là c’est bon, il ne me regarde plus. Qu’est-ce que je vais faire ? » demandais-je désespérée. « Déjà, tu vas te taire et tu vas te reprendre. T’es Carly Ainswoth on est d’accord ? J’hochais la tête. « Et alors ? Qu’est-ce qu’il t’arrive ? T’es la fille la plus géniale du monde, s’il le voit pas. Il est con. En plus, t’a la jambe dans le plâtre, t’a juste à mimer une feinte et tout le monde accourt. « Je suis sûre que c’est de la faute de cette garce là. Regarde là, à rire bêtement. » continuais-je en ignorant tout bonnement ma meilleure amie. Elle s’essouffla et partit. En un rien de temps, Cooper avait pris le relais. « Alors ton petit-copain t’a lâché ? » demanda-t-il en me prenant les mains et en m’accompagnant jusqu’à la piste de danse. « Ce n’est pas mon copain premièrement et deuxièmement, il ne m’a pas lâché. » déclarais-je peu sûre de moi. Techniquement, je venais de me faire lâcher en beauté et cela depuis une semaine. Et sans Ezra, je me sentais vide, sans aucune importance. « J’avoue, je me suis fais techniquement lâchée enfin. » dis-je finalement en observant mon cavalier. Il était habitué du camping depuis des années et on s’était souvent parlé, enfin il avait plutôt souvent tenté de me séduire. « il me regarde même pas, il m’ignore carrément. » dis-je en continuant sur ma lancée, ayant trouvé une nouvelle oreille. « il reste avec elle là et moi il ne me regarde pas. » me plaignis-je en les regardant une nouvelle fois. Tout d’un coup, Cooper m’embrassa. Au moins ça avait le mérite de me faire taire mais lorsque je le regardais avec de grands yeux ouverts il me rétorqua : « Maintenant il te regarde. »