Je me posais de plus en plus de questions sur ma relation avec Tommy. En apparence la situation est simple, nous sommes mariés, mais on se déteste et on s'évite le plus possible. Rien de compliqué. Pourtant, je m'ennuie quand il n'est pas là, je ne veux pas l'admettre, mais quand je suis toute seule, il me manque. Assise sur les gradins du terrain de sport je regarde des enfants jouer au tennis, un sport que j'ai toujours apprécié. Étant plus jeune mes parents m'avaient inscrite dans un club et j'y étais resté une dizaine d'années avant d'arrêter juste pour énerver sa mère. Plongée dans mes pensées, je n'avais même pas remarqué les enfants sortir du terrain et la pluie qui commençait à tomber. La pluie ? C'était tellement rare à Cancun que ça ne présageait rien de bon. L'orage commença à gronder et je ne perdis pas de temps pour sortir moi aussi du terrain. L'orage n'était vraiment pas mon truc. Même en sécurité dans un endroit sûr, j'avais toujours peur qu'il arrive quelque chose. Une averse s'est mise à tomber et je fus trempée en très peu de temps. Je n'aimais pas l'orage, mais j'adorais la pluie. Si je n'avais pas entendu le tonnerre j'aurais pu rester là debout, au milieu du camping, les cheveux dégoulinant. Tout le monde se dirigeait dans la même direction et j'ai suivi la foule. Je suis entrée dans la bibliothèque déjà pleine de monde et j'ai regardé autour de moi. Les gens ne parlaient que de cet orage, ce qui n'était pas étonnant puisque ça n'arrivait que très rarement. Cherchant quelqu'un que je connaissais j'ai aperçu Tommy en compagnie d'une fille que je n'avais jamais vue. Une très jolie fille d'ailleurs, certainement sa prochaine conquête. J'ai alors profité de l'occasion pour énerver Tommy et je me suis décidée à faire foirer son plan drague. Et d'un autre côté, ça me permet de ne pas rester seule au milieu de toute cette agitation. Je me suis avancée toute souriante vers lui et me suis collé à lui en le prenant par la taille. « Alors ? Comment va mon petit mari ? » « Mari ? C'est ta femme ? » Elle le regarda d'un air ahuri attendant sa réponse et lui me lança un regard à vous glacer le sang. J'avais tellement l'habitude de ces regards que ça ne me faisait plus rien. « Oh, il ne te l'a pas dit ? » C'était ironique, évidemment qu'il ne lui avait pas dit, sinon il n'aurait pas pu coucher avec elle. J'avais une envie folle de rire et de montrer à quel point j'étais fière de moi, mais je me suis retenue, j'aurais tout le temps de me vanter de ma victoire quand cette fille serait partie.

Alors que je me collais à lui, souriant – sourire faux, évidemment – à la fille devant moi, il fit semblant de m’ignorer et regarda sa nouvelle conquête d’un air gêné. « C'est sans importance Mad'... » Elle ne fit même pas attention aux paroles de Tommy et comme je l’avais prédit elle s’énerva et partit sans perdre de temps. Mon plan avait fonctionné à merveille, comme toujours. Je n’avais aucun remord quand je faisais ça, dans un sens je rendais service à ses filles, elles se font souvent de fausses idées sur Tommy. Il trompe tout le monde avec sa tête d’ange, mais si elles croient qu’il va être le petit-ami parfait, elles sont loin de la vérité. Et puis ma jalousie jouait aussi certainement un rôle important dans mon comportement. «Mad, comme c’est mignon, tu lui donnes déjà des petits surnoms. Cela dit, pas sûr qu’elle veuille encore que tu l’appelles comme ça. » J’ai l’ai alors regardé d’un air innocent, comme j’avais l’habitude de le faire pour qu’on me pardonne, cependant je ne savais pas s’il allait laisser tomber si facilement. Il se dégagea de mon étreinte et se mit face à moi. « Je suppose que tout ça te donne envie de rire, mais est-ce que moi je t'interromps lorsque tu vas voir des mecs bourrés d'auto-bronzant sur la plage ? » Je m’étais attendu à ce qu’il me dise d’aller voir ailleurs, mais il a dit ces mots d’une façon assez calme. Ce n’était plus aussi marrant pour moi s’il ne le prenait pas mal, mais j’étais quand même toujours fière de moi. J’ai senti sa main sur mon épaule, me réchauffant légèrement. A cause de la pluie j'étais trempée jusqu'aux os et j'ai regretté de ne pas voir de vêtement sec sous la main. Toujours face à lui j’ai croisé les bras et ai froncé les sourcils. « T’es pas drôle. Avoues que c’était amusant. Et puis les mecs que je vais voir sont pas bourrés d’auto-bronzant, c’est pas de ma faute si t’es blanc comme un cachet d’aspirine. » Bien sûr, il n’était pas si blanc que ça, mais c’est la mauvaise fois féminine, je n’y peux rien. Dégageant sa main de mon épaule, je me suis dirigée vers la première étagère qui venait et j’ai pris un livre au hasard. On était bloqué là et on n’avait rien à faire, autant que j’en profite pour développer ma culture générale. Alice au pays des merveilles, mon conte préféré, je l'avais déjà lu des centaines de fois. Tant pis, je n'avais pas envie d'en chercher un autre. Je me suis assise à la table la plus proche et Tommy s’est assis en face de moi. J'avais à peine lu 2 pages du livre qu’une panne de courant plongea la bibliothèque dans le noir complet. « Super, il manquait plus que ça, comment je vais lire maintenant ? » On entendit le brouhaha des campeurs s’intensifier et des bougies ont été allumées. La plupart des gens râlaient et se demandaient quand cette tempête allait finir pour qu'il puisse enfin retourner à leurs occupations. Une gentille dame eu l’amabilité d’en apporter quelques unes à notre table. J’ai lancé un regard vers Tommy, il était plutôt sexy comme ça, à la lueur des bougies, les cheveux encore mouillés. J'ai alors souri sans le vouloir, mais j'ai vite repris mon sérieux, l'ignorant et continuant ma lecture.